Le Tigre et les deux fillettes en gare de Saverne
Le lundi 9 décembre 1918, le train présidentiel roule vers Strasbourg. À 8 h 15, il fait une halte en gare de Saverne. À son bord, se trouvent le président Raymond Poincaré et le chef du gouvernement Georges Clemenceau.
« Les revoici » d’après un dessin de Léon Fauret. Document remis.
Sur l’image, Clemenceau est figuré en grand-père vigoureux, l’oeil vif, la moustache blanche et le chapeau cabossé.
Il porte sur ses bras deux fillettes espiègles aux joues rondes, représentant les provinces recouvrées. Elles ont l’air d’avoir assez bien supporté les rigueurs de la cession à l’Allemagne.
Les coiffes d’Alsace et de Lorraine portent chacune une cocarde tricolore. La carte postale de l’illustrateur Léon Fauret (1863-1955) a été utilisée avec d’autres documents par Coralie Sebellin du service de communication de la Ville, pour réaliser le visuel des manifestations du centenaire du retour de l’Alsace à la France, notamment l’exposition « Saverne 1918, Le grand tournant », au musée de Saverne.
Un sacré gaillard !
En novembre 1918, Clemenceau a 77 ans. Médecin de formation, époux (réputé volage) d’une Américaine, ami des impressionnistes, pratiquant l’escrime et la natation, il a derrière lui une longue carrière journalistique et politique.
Opposant républicain sous le Second Empire, il est en 1871 maire de Montmartre et député à l’Assemblée nationale. À ce titre, il proteste avec les députés alsaciens et lorrains contre toute cession territoriale à l’Allemagne.
Anticlérical, anticolonialiste et dreyfusard de la première heure, il est un tombeur de ministères redouté. En novembre 1917, il est appelé par le président Poincaré à la présidence du conseil. Il incarne l’effort de guerre et orchestre à son profit un culte de la personnalité (le Tigre, le Père-la-Victoire).
Le 6 novembre 1918, cinq jours avant l’Armistice, il annonce la victoire à la Chambre et est longuement acclamé par les députés.
Clemenceau et l’Alsace-Lorraine
Balayant les propositions prudentes de la Conférence d’Alsace-Lorraine et déniant toute représentativité aux élus alsaciens et lorrains du Conseil national, Clemenceau veut départementaliser, assimiler, franciser au plus vite. Il nomme à Strasbourg, Colmar et Metz trois commissaires de la République francs-maçons et ignorant l’allemand. Les premiers mois de la nouvelle administration française sont chaotiques.
L’œil du Tigre
Cédant à la demande de Louis Knoepffler, maire de Saverne, Poincaré consent à une halte en gare de Saverne avant la grande réception de Strasbourg, place Kléber. Deux minutes, pas plus.
Gare de Saverne : Clemenceau ne descend pas du train
Sur le quai, trois petites filles offrent un bouquet et récitent un compliment. Elles sont gratifiées d’une montre par les services de la présidence.
Clemenceau ne descend pas du train. Dans le Journal de Saverne, Paul Gilliot est impressionné par le grand homme et écrit : « J’ai vu sous les sourcils broussailleux, luire l’œil du Tigre ».
Source : DNA
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